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Le consensus politique,

Socle de la solution à la crise nationale


28 Mai 2014 | 19:44
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La réunion de Tripoli, la guerre entre l’armée des frontières et les combattants de l’intérieur, la crise politique qui a suivi l’été 1962 ont fini par remettre en cause le consensus sellé le 1 novembre 1954, approfondit lors du congrès de la Soummam en 1956. 52 années après l’indépendance, il est arrivé le temps de solder ce conflit entre le groupe d’Oujda et le GPRA afin de permettre aux nouvelles générations d’évoluer dans un climat sain et serein.  Pour le permettre, il s’agit d’œuvrer à la reconstruction d’un nouveau consensus politique national à même de donner un nouvel élan pour l’Algérie.

L’après élection présidentielle

Le 17 avril 2014, le système a organisé une élection close qui, au lieu de déboucher sur des perspectives de sortie de crise, a maintenu le statut quo ambiant ! Un statu quo soutenu par les partenaires étrangers qui commencent, quelques semaines après la présidentielle, à cueillir les fruits de leur assistance… En effet, le contrat accordé pour les français afin d’exploiter le gaz de schiste n’est que l’entame d’un processus de concessions qui peut menacer, dans l’avenir, nos intérêts vitaux en tant que nation.

Cette décision stratégique qui a surpris l’opinion publique nationale intervient au moment même ou le pays stocke ses réserves en devises dans le trésor américain au lieu de les engager dans la reconstruction planifiée d’une économie productive. En confiant l’exploration des gisements de gaz de schiste à des firmes étrangères dans l’objectif évident de sécuriser le niveau de recettes en devises, nous sommes en devoir de nous élever contre l’absence de leurs retombées sensibles sur l’économie nationale et sur le niveau de vie des algériens qui aspirent à une vie décente. A ce signe manifeste de mauvaise gouvernance, il faut relever que ces recettes seront sous contrôle des firmes étrangères qui, en vertu des contrats d’exploration, auront le droit à l’appropriation et à la l’exploitation de ces gisements aux effets néfastes sur les nappes phréatiques et l’environnement, si bien entendu, des mesures
technologiques
draconiennes ne sont pas prises. Ce qu’est étonnant !

Ce qui ne nous étonne pas par contre, c’est le fait que face à un pouvoir isolé, les partenaires étrangers profitent au maximum pour engorger le plus de bénéfices possibles, sans considérer aucunement les dégâts qu’ils peuvent occasionner. En effet, seuls leurs intérêts priment ! C’est la règle dans les relations internationales dira l’autre, d’autant plus que la crise économique persiste à l’échelle du monde, que la lutte pour le positionnement est à son summum entre les grandes puissances.

Considérant ce genre de situations qui peuvent hypothéquer durablement l’avenir de nos enfants, et qui sont la conséquence directe de l’illégitimité du pouvoir en place, nous devons reconnaitre avec toute la lucidité qu’exige la gravité du moment que seul un consensus national peut permettre à notre pays de défendre ses intérêts en échappant aux chantages multiformes qu’il peut subir. Un consensus politique synonyme de cohésion nationale, de démocratie et de bonne gouvernance.

Confusion relative

Il faut admettre que le défi à relever n’est pas une mince affaire. La reconstruction du consensus national est une œuvre monumentale qui ne peut s’accommoder de l’agitation et de l’improvisation politique. Durant 50 ans de règne absolu, le système a brisé tous les ressors de la société, et avec eux, le rêve algérien qui a eu raison de la force terrible de l’OTAN, obligeant la population à s’inscrire dans la régression et à chercher refuge dans le régionalisme clos, le tribalisme et la corruption sous toutes ses formes.

Sur le plan politique, le système a installé une confusion qui empêche toute visibilité et qui handicape la marche vers le changement auquel aspire la nation.
En effet, il est aisé d’observer que toutes les contradictions politiques sont devenues secondaires, que ce soit entre le pouvoir et l’opposition, que ce soit au sein du pouvoir lui même que dans les rangs de l’opposition.

Cette situation de « confusion » est favorable à l’immobilisme politique qui provoque tout les égarements. En effet, devant l’absence d’une contradiction principale qui détermine le véritable enjeu autour duquel peut se structurer le combat politique, les forces en présence peinent à trouver leurs marques, et les forces et hommes politiques les plus fragiles passent d’une position à son opposé sans que cela ne choque autre mesure ! Le cas des cadres qui ont quitté le
FFS sous prétexte qu’il a perdu sa radicalité pour, en fin de compte, rejoindre Bouteflika et Benflis illustre parfaitement ces troubles politiques provoqués par des officines aux capacités diaboliques. 

Le changement du système est l’enjeu capital dirons-nous. Oui, certainement ! Seulement, force est d’admettre que ce changement est revendiqué aussi bien par l’opposition que par le pouvoir en place. A bien observer, nous ne sommes plus dans la situation où le pouvoir combat franchement le changement et défend clairement ses options anti-démocratiques. Avec le temps, toutes ses positions on été nuancée ! Plus que ce « changement » d’attitude et de comportement, le pouvoir œuvre à s’accapare les plus historiques des revendications de l’opposition : « retrait de la police politique de la vie partisane et institutionnelle… », etc.

Nous avons tous assisté à la séquence où le secrétaire général du FLN dénonçait le parton du DRS, que des voix dites démocrates se sont élevées pour défendre ! Nous avons tous lu des déclarations de généraux s’attaquer avec violence et sans retenue au vice ministre de la défense, le qualifiant de tous les noms d’oiseaux… Au-delà des motivations et des objectifs des uns et des autres, ces scènes étaient inimaginables il y’a de cela quelques années.

Par cette offensive et d’autres encore, les secteurs du système tentent-ils de remettre en cause le monopole de l’opposition sur la critique du pouvoir et la demande de changement ? Cette volonté existe, bien évidement ! Elle s’exprime à tous les niveaux et de différentes façons. D’ailleurs, n’est ce pas M. Ali Benflis, avocat, promu ministre de la justice dans le gouvernement de M. Kasdi Merbah par le général Larbi Belkheir qui l’avait remarqué au sein de la ligue des droits de l’homme initiée pour contrer la LADDH, que la presse présente aujourd’hui comme patron de l’opposition ? … Certes, chaque personne a le droit d’évoluer. Mais pas à cette vitesse et de cette manière ! On ne devient pas l’homme de tous les espoirs après une vie complète au service du régime et 15 années de silence ! Une transition politique personnelle est nécessaire !

Ceci dit, force est de constater que les évolutions bouleversantes qu’à connue la scène politique ne sont pas encore mûres pour tirer toutes les conclusions qui s’imposent. Sommes-nous devons des processus de décantation qui traversent aussi bien le pouvoir que l’opposition et qui annoncent une restructuration totale de la scène politique ? Y a-t-il une volonté de conduire le système vers sa mort afin de permettre la naissance d’un système démocratique ? Pour survivre dans un monde impitoyable, l’Algérie tournera-t-elle le dos à la Russie pour jouer le rôle du Pakistan en Afrique du Nord et au Sahel ? La réintégration des dirigeants de l’ex FIS dans le jeu politique tant par le pouvoir en place que par la coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique, qui tente de parler au nom de l’opposition, annonce-elle le retour de ce parti sur la scène politique ? Pourquoi en ce moment exactement ? Pourquoi
la même position et au même temps ?

Face à cette situation inédite, il est utile de relever que le rythme effréné des «  changements » des mentalités et des positions mises en évidence contraste totalement avec l’immobilisme et l’indifférence qui caractérise la société ! De ce tableau, nous pouvons percevoir tout l’intérêt qu’il y a à éviter la simplification et la précipitation politique. Les événements qui se déroulent sous nos yeux nous incitent à beaucoup de prudence et de vigilance politique.

Entre consensus et transition

« Consensus » et « transition » sont les concepts qui structurent les feuilles de routes de l’ensemble de la classe politique. Le président Bouteflika, dans sa dernière initiative de « réforme politique » parle de constitution « consensuelle » et son ministre d’Etat, M. Abdelaziz Belkhadem, de « transition politique  ». Si M. Ahmed Ouyahia, l’autre ministre d’Etat, dit refuser la « transition », c’est probablement pour imposer une négociation serrée que le système craint profondément, mais qui va finir tôt ou tard par s’imposer à lui.

Partant de ce constat, peut-on considérer que les tractations sont déjà entamées ? Peut-on comprendre que chacun des acteurs politiques est en train d’avancer ses pions en donnant le contenu qui l’arrange à ces concepts clés du jeu politique ?
Rien ne plaide pour le contraire. La scène politique s’anime de plus en plus. En effet, c’est au moment où la coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique programme une conférence sur la transition, que le pouvoir soumit à débat une nouvelle révision de la constitution dite « consensuelle. », que M.Mouloud Hamrouche entame des sorties publiques pour plaider pour le consensus entre toutes les forces politiques et sociales. Chose que le FFS a commencé à faire il y a déjà quelque temps autour de thématiques pouvant être des soubassements au consensus national.

La dynamique est ainsi enclenchée. Les initiatives vont se multiplier. Et chacun des acteurs politiques ira dans la direction que lui dictera son parcours et ses intérêts. Mais force est de constater qu’à l’heure actuelle, le pouvoir autant que la coordination pour les libertés font fausses routes…
Consensus dont et avec la société

La première victoire du FFS, symbolique il faut l’avouer, est celle de faire admettre ses propositions à l’ensemble de ses partenaires, même si quelques-uns tentent de le dépouiller de ses concepts, de l’isoler du jeu politique, de le neutraliser afin de les gérer à leurs guises. Seulement, l’histoire du FFS, son prestige, son expérience politique qui l’immunise de tout conditionnement font de lui un élément essentiel des changements qui s’annoncent.

Consensus politique et transition démocratique, des voies complémentaires qui permettront au pays de dépasser définitivement la crise qui l’étouffe depuis des décennies. De leur articulation intelligente dépendra l’avenir de ce processus prometteur et irremplaçable…

En effet, l’un des objectifs essentiels du Consensus politique est de sécuriser la transition démocratique à venir, de la doter d’une base politique et d’un contenu qui permettra sa réussite. C’est dans ce sens que la conférence sur le consensus politique doit précéder celle sur la transition, que la constitution consensuelle viendra en fin de parcours pour couronner le tout.

C’est un processus pacifique, graduel, ordonné, qui prendra le temps qu’il faut pour donner ses fruits. Il s’agit d’éviter la précipitation et l’agitation dans la situation actuelle.

Consensus autour de l’indépendance de la justice, consensus autour de la propriété nationale sur les ressources énergétiques, consensus autour de l’officialisation de tamazight, consensus autour d’une politique nationale des langues, consensus autour d’une économie productive et diversifie, consensus sur le non usage de la violence dans le champ politique… des consensus à construire dans la société et avec elle, car son la société, aucune construction durable n’est possible…

D’ailleurs, l’esprit même du consensus politique vise à replacer la population au centre de la vie politique, puisque son implication consciente seule peut prémunir le pays contre toute tentative de changement violent aux conséquences incalculables d’un coté et de préserver notre souveraineté, notre autonomie de décision et notre cohésion nationale d’un autre coté.
Après le consensus révolutionnaire qui a libéré le pays, il s’agit d’élaborer un consensus démocratique qui permettra sa pérennité et son développement.

Brahim Tazaghart
Le 26/06/2014



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