Accueil Mag Santé

Diabète

Vivre avec un diabétique : quelle place pour le conjoint ?


diabte

24 Avril 2014 | 13:03
shadow


Auteur :


diabte

Repas équilibrés, recours aux médicaments ou aux injections d'insuline, contrôle du taux de sucre dans le sang... Le diabète oblige à suivre un ensemble de règles plus ou moins contraignantes pour éviter les complications. Lorsqu'il est mal équilibré, il peut aussi provoquer des malaises liés aux hypo ou hyperglycémies. Une situation pénible à vivre pour les personnes touchées mais aussi pour l'entourage.

Le conjoint, en particulier, ne sait pas toujours quelle attitude adopter pour motiver la personne diabétique à suivre ses traitements, parer aux éventuelles urgences ou montrer son soutien sans être envahissant... Il peut parfois avoir le sentiment d'être mis à l'écart ou, au contraire, trop sollicité. Comment trouver sa place ?

Diabète, le quotidien pénible aussi pour le conjoint

"Il existe différentes situations en fonction du type de diabète et de la personnalité du patient, observe le Dr Clara Bouché1, endocrinologue-diabétologue, spécialiste en éducation thérapeutique du patient. Cependant, la maladie nécessite certaines adaptations qui retentissent sur le quotidien du patient et de son entourage." Le diabète insulino-dépendant (diabète de type 1) est le plus contraignant puisque les personnes atteintes doivent prendre en compte l'ensemble de leurs apports (alimentation) et dépenses (activité physique) en sucres, mesurer la concentration de sucre dans le sang (glycémie) et s'auto-injecter de l'insuline plusieurs fois par jour.

Le diabète nécessite des repas équilibrés

Le Dr Bouché précise : "Le rythme et la composition des repas laissent peu de place aux imprévus. Pour aider la personne diabétique, ces repas doivent néanmoins rester des moments de partage et de convivialité, ce qui oblige les autres membres de la famille à suivre les mêmes règles." Parmi les personnes diabétiques, certaines ne peuvent absolument pas sauter de repas, faire honneur au dessert ou se consoler avec une orgie de chocolats... Autant ne pas les tenter.

Les angoisses et l'irritabilité du diabétique pèsent sur le couple

Comme toute maladie chronique, le diabète atteint l'image de soi. La perte de l'idéal de santé peut être difficile à vivre et source d'angoisses, entretenues par les incertitudes et contrôles obligatoires liés à la glycémie. Norbert Zerah, psychologue, explique dans l'un de ses articles : "Qu'il soit dans un versant hyperglycémique ou hypoglycémique, le diabétique craint un déséquilibre occasionné par un manque de sucre ou son élévation. [...] Cette anxiété risque de provoquer d'autres troubles du comportement (dépression, somatisation, violences conjugales, irritabilité...)".

Les troubles de la sexualité dus au diabète

Le diabète affecte la sexualité, du fait de ses répercussions psychologiques mais aussi des troubles physiques, favorisés par son ancienneté et les déséquilibres glycémiques. "L'excès de sucre dans le sang abîme les petits vaisseaux et, parfois, les terminaisons nerveuses avec des conséquences sur la libido", confirme le Dr Bouché. Les hommes, en particulier, peuvent souffrir de troubles de l'érection et de l'éjaculation. Les femmes seraient quant à elles davantage victimes de mycoses et de sécheresse vaginale pouvant rendre les rapports sexuels désagréables3.

Mieux comprendre les malaises diabétiques liés aux hypoglycémies

Ces éléments permettent d'appréhender certaines des difficultés rencontrées au sein du couple. Toutefois, lorsque des conjoints de diabétiques échangent, notamment sur les forums internet, ils semblent davantage préoccupés par les hypoglycémies. Une épouse épuisée confie qu'elle a du mal à supporter les crises de son mari car il devient violent4. Sur son blog, Norbert Zerat note que l'agressivité peut avoir plusieurs origines5. Lorsqu'elle est liée au manque de sucre (hypoglycémie), elle est souvent précédée de signes avant-coureurs comme une agitation.

Une autre femme craint que son compagnon se blesse ou la blesse pendant une crise car il gesticule et cherche à se lever alors même qu'il est inconscient6. Le Dr Bouché explique : "Normalement, le patient diabétique perçoit les premiers signes de l'hypoglycémie, liés à la libération d'adrénaline par l'organisme (hormone du stress) : il a faim, se sent nerveux ou anxieux. Il peut aussi avoir des palpitations, des tremblements... Dans un second temps, si l'hypoglycémie n'est pas corrigée, d'autres signes apparaissent comme des étourdissements, des troubles de la parole ou une confusion".

Lorsque les hypoglycémies ont été trop fréquentes ou trop prolongées, le corps a toutefois tendance à s'y "habituer" et ne libère plus d'adrénaline. "Les signes de souffrance cérébrale apparaissent alors directement, poursuit la diabétologue. Ils peuvent déboucher sur une perte de connaissance, voire un coma, mais la personne n'a pas conscience de son état et peut même refuser d'absorber du sucre. C'est très angoissant pour l'entourage qui se sent démuni".

Lorsqu'il dort, le sujet diabétique ne perçoit pas non plus les premiers signes des hypoglycémies. Un homme explique que sa compagne a déjà fait plusieurs comas hypoglycémiques nocturnes avec convulsions qui l'inquiètent énormément4. "Cette "psychose" de ses hypoglycémies me gâche la vie (nervosité quasi continue, idées noires, troubles du sommeil...) et, par extension, compromet notre couple puisque nous n'arrivons plus à dialoguer".4

S'informer sur le diabète, dialoguer... et déculpabiliser !

Mieux comprendre le diabète, le régime à suivre, le calcul des glucides ou des unités d'insuline peut être rassurant. Le Dr Bouché invite régulièrement des conjoints à venir aux consultations, surtout lorsque le couple est récent. "Cela permet de balayer certaines idées reçues et de répondre aux angoisses concernant les risques de transmission lorsqu'il existe un désir d'enfant." Certains patients viennent spontanément en couple. D'autres aimeraient que leur partenaire s'intéresse davantage mais il ne veut pas faire cette démarche. Enfin, il y a ceux qui préfèrent "gérer" seuls, plus ou moins sérieusement.

Dans tous les cas, le diabète ne doit pas devenir un sujet tabou pour le couple. "Chacun doit pouvoir exprimer ses ressentis et ses attentes pour trouver le juste milieu qui convient aux deux", encourage le médecin. Au minimum, elle conseille de savoir répondre aux urgences : "Si le malaise hypoglycémique conduit à une perte de conscience, le conjoint doit savoir qui avertir ou être capable de réaliser lui-même une injection de glucagon".

Par amour et parce qu'il subit aussi les conséquences des déséquilibres du diabète, le conjoint peut avoir tendance à "surveiller" la personne atteinte en insistant pour qu'elle prenne ses rendez-vous médicaux, en comptabilisant les glucides à sa place, en demandant davantage de contrôles glycémiques... Si cette dernière ne suit pas les conseils, il se sent incapable d'aider et culpabilise. Pour le Dr Bouché, il ne faut pas se sentir responsable : "L'entourage peut se montrer disponible et faciliter les bons comportements mais les changements sont impossibles à imposer. C'est au patient de se prendre en charge". Les associations et forums internet aident alors à se sentir moins seuls.

Les conjoints de diabétiques plus à risque de diabète

C'est ce que tend à démontrer l'analyse d'une équipe canadienne7. Les chercheurs ont repris la littérature scientifique explorant ce sur-risque et sélectionné cinq grandes études qui concernaient au total 75 498 couples. Ils concluent qu'indépendamment de l'âge et d'autres variables - excepté l'indice de masse corporelle (IMC), reflétant la corpulence - être en couple avec une personne diabétique augmente de 26 % le risque de contracter à son tour la maladie, 18 % si l'on tient compte de l'IMC.

Que l'on se place du côté des conjoints ou des conjointes de femmes et d'hommes diabétiques, les chiffres sont sensiblement identiques. Ils confirment le rôle de facteurs environnementaux et comportementaux dans l'apparition du diabète et pourraient motiver les deux partenaires du couple à agir pour améliorer leur hygiène de vie et se protéger mutuellement.

In doctissimo.fr



Plus d'info

Commentaires

Laisser un commentaire

Merci Votre commentaire a été ajouté avec succés.
Commenter