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Prochain découpage administratif: Quels impacts réels pour quels coûts

par le pr Abderrahmane Mebtoul


04 Juin 2014 | 13:23
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En prévision d’un nouveau découpage administratif, un groupe de travail, présidé par le secrétaire général du ministère de l’Intérieur, a été installé afin de se pencher sur le dossier. Le ministre des Relations avec le Parlement a déclaré dans une interview récente à la radio nationale que le projet du nouveau découpage administratif qui sera promulgué durant le mois de septembre 2014, érigera 17 nouvelles wilayas, entrera en vigueur le début de l’année 2015, affectera en premier lieu les régions du sud et les hauts plateaux et dans une autre phase les régions du Nord. Or se posent des questions stratégiques qui engagent l’avenir du pays : au moment où dans les grandes démocraties et pays émergents, une nouvelle politique de réformes du territoire autour de grands pôles régionaux se met en place, pourquoi l’Algérie multiplie les unités administratives sans réelle coordination entre elles, pouvant occasionner des surcoûts et accroître al bureaucratisation de la société ?


Auteur : Contribution


 

  1. La wilaya  algérienne est une  institution constitutionnelle. D’après l’article 15 de la constitution, « les collectivités territoriales de l’Etat sont la commune et la wilaya ». D’après l’article 1er de la loi  90.08 du 7 avril 1990 relative à la wilaya, « la wilaya algérienne est une collectivité territoriale créée par la loi et une circonscription administrative déconcentrée de l’Etat ». La wilaya est organisée en plusieurs structures : un chef de cabinet- un  secrétariat général  avec un service de la Coordination -un service des archives  et un service de la documentation. L’inspection générale avec des services- La Direction de la Réglementation, des Affaires Générales et du Contentieux  composée du  Service de la Réglementation Générale, du  Service de la circulation des personnes, du   Service des Affaires juridiques et du contentieux. La Direction de l’Animation Locale  constituée du  Service du Personnel, du Service de l’Animation  et du  Service du Budget et du Patrimoine. Et plusieurs autres structures  dont la Direction des Transmissions Nationales (DTN) et des   Directions sectorielles. Chaque wilaya est structurée  en plusieurs daïras, qui elles mêmes  sont structurées en plusieurs communes nécessitant des fonctionnaires. Et au niveau de chaque wilayas sont  prévues des assemblées populaires de wilayas – APW- et au niveau de chaque commune  des assemblées populaire  communale, représentées les  partis élus. Comment seront représentés les élus dans les nouvelles wilayas ?  Les nouvelles wilayas impliqueront  également des directions de chaque Ministère  budgétivores compris  des services de gendarmerie, de la DGSN, des   tribunaux ect…Toutes ces structures  sont un coût. Actuellement le  nombre de wilayas actuellement est de 48, les daïras au nombre de 548 et le nombre de communes de 1541. Qu’en sera t- il des coûts supplémentaires en vue de la création des nouvelles 17 wilayas ? -L’on doit distinguer les frais de départ, des frais fixes notamment ceux du fonctionnement   des frais variables, dépenses annuelles. Les frais de départ sont la construction des sièges wilayas-daïras-APC, directions sectorielles, l’ameublement  de ces structures, parc  de voitures  et  l’installation des commodités,   pouvant être estimés à un milliard de dinars par wilaya soit 17 milliards de dinars , et au cours de 75 dinars un dollar 130 millions  de dollars au minimum. Pour les frais fixes nous en tenant seulement aux salaires , si  l’on prend pour toutes ces directions et nouvelles structures un effectif moyen  de 3000, du Wali, chef Daïra, communes ,des  cadres  aux secrétaires et  aux gardiens , avec un salaire brut  moyen seulement  de 50.000 dinars ( net environ 35.000 dinars par mois), nous aurons un montant salarial annuel par wilaya de  2 milliard de dinars et pour les 17 wilayas prévus  environ   34 milliards de dinars  soit 454 millions de dollars. Les frais variables peuvent représenter environ 25/30% du budget de fonctionnement en cas d’une gestion rigoureuse  et 40/50% en cas d’une gestion défectueuse. En prenant le ratio de 30%  cela  nous donnerait un total  qui approcherait 600 millions de dollars  annuellement pour  les 17 wilayas. Si l’on prend une autre hypothèse, un salaire net moyen de 70.000 dinars par mois  le montant serait annuellement  de plus de 1,2 milliard de dollars. L’on peut supposer que le cout global, en tenant compte, d’une stabilisation de la  valeur du dinar, tout dérapage gonflant les couts,  et  des amortissements étalés sur une période de 20 ans, pourrait fluctuer  entre 600 et 1,2 milliards de dollars annuellement.  Ramené au budget du Ministère de l’intérieur de 2014,  cela représenterait un accroissement qui approcherait 8%  pour le premier cas et 16% pour le second cas ce qui serait insupportable. Par rapport aux recettes moyennes d’hydrocarbures  cela représenterait pour l’hypothèse une   environ  0,92%  et 1,9% pour l’hypothèse deux  en référence  à 65 milliards de dollars en 2013. Cela gonflera encore plus le budget du Ministère de l’intérieur. En effet , selon  les  données publiées au journal officiel,  comparé  au budget du Ministère de la défense nationale qui a évolué  de 0,2 milliard de dollars en 2000, à 2,8 en 2005, - à 6,9 en 2011, -11,0 en 2013 et 12,7 milliards de dollars en 2014, le budget  du ministère de l’intérieur  incluant  les budgets de wilayas  ,  les effectifs et les équipements de la DGSN  dont les effectifs sont passées d’une moyenne de 100.000 début 2000 à plus de 200.000 en 2014,  a évolué ainsi : année 2000 à  0,9 milliard de dollars – 2001 à  1,1 – 2002 à  1,4 – 2003 à  1,9- 2005  à 2,5 – 2006 à  3,3 – 2007 à  4,4- 2008 à  4,5- -2009 à  5,1- 2010 à  5,2- 2011 à  5,6- 2013 à  7,6 et enfin prévisions 2014 à  7,3 milliards de dollars. Ainsi en référence à l’année 2000 en 20014, l’accroissement du budget du Ministère de l’intérieur a été de 720% et celui du Ministère de la défense de 846%. Concernant les wilayas,  ce n’est là que le budget normal de fonctionnement annuel. Assistera –on à de nouvelles enveloppes financières pour ces wilayas, les rallonges budgétaires  lors de la dernière tournée du premier ministre dans les  48 wilayas  ayant  été estimées selon certaines sources à 1440 milliards de dinars soit 19 milliards de dollars  (part dinars et part devises), soit environ 29% des recettes des hydrocarbures de 2013.

 

  1. -Cependant il faut éviter  de poser de mauvaises questions à de faux problèmes faute  de vision stratégique et se pose plusieurs questions en termes d’opportunités puisque l’objectif est de rapprocher les structures de l’Etat des citoyens. Avec  les  nouvelles technologies n’aurait t- on pas  pu décentraliser au niveau des APC, en créant uniquement quelques services  ce que demande   quotidiennement  les citoyens ? Quel critère,  population, distance, devant abandonner la vision administrative,  l’espace économique ne se confondant  pas avec l’espace géographique  et ce  pour des entités fiables ? Ne risque t- on encore accroître une  bureaucratie locale avec sa cour plus néfaste qu’une bureaucratie centrale ?  N’est-il pas  illusoire de croire que l’on attirera  des investisseurs potentiels  au sein  de micros wilayas ? Qu’en sera-t-il en cas de chute du cours des hydrocarbures prévue entre 2015/2017 et pourra-t-on continuer dans ces dépenses improductives, emplois rentes sans contreparties productives et subventions quitte à épuiser le fonds de régulation des recettes et les réserves de change au bout de quatre années en retournant au FMI horizon 2018/2020 ? Et là se pose toute la question de la  réorganisation du territoire afin  d’accroitre  à la fois  l’efficience  économique et l’efficience sociale, existant une loi économique : les effectifs  dans  l’administration devant être au service des citoyens et de l’économie vivant par des transferts d’impôts, devant être réduite au minimum car ne créant pas de richesses .  Rappelons que la population active du moment, au sens du BIT, a atteint en 2013 11 964 000 personnes, soit un accroissement relatif de 4,7% par rapport à septembre 2012. Selon l’ONS, la structure de l'emploi par secteur d'activité est dominée par le secteur tertiaire (commerce et services) qui emploie en 2012/2013 plus de la moitié soit 59,8% des actifs, suivi du BTP avec 16,6% (près de 2 millions dont plus de 50% sont des catégories inférieures), l'industrie (13%, donc 1,6 million avec la dominance du privé constitué en majorité de PMI-PME) et l'agriculture (10,6%). Entre 2005 et 2012, nous avons une croissance des effectifs s’élevant à 47% dans la fonction publique, presque 2 millions en 2012, plus de 2,1 en 2013 après les derniers recrutements dont 86% bénéficiant d’un statut de permanent, selon la Direction générale de la Fonction publique. Mais si on s’en tient aux statistiques du Cnas, qui prend également en compte les recrutés dans le cadre du pré-emploi, la fonction publique algérienne totaliserait près de 3 millions d’agents en 2013.  C’est que globalement, le  budget de fonctionnement a connu une augmentation de 378,9 milliards de dinars, comparativement aux dotations allouées dans la loi de finances 2013. Aussi, les dépenses projetées par la loi de finances PLF 2014 au cours officiel sont d’environ 100 milliards de dollars. La hausse des dépenses par rapport à 2013 est de 11,3%. Cette croissance du budget de fonctionnement est 3 fois plus rapide que celle du PIB (annoncée à 4,5% mais les prévisions dans ce domaine ne sont jamais réalisées depuis 2005, et rendant illusoire le taux de croissance de 7% horizon 2017 sans réformes structurelles ). Pour la Banque d’Algérie, le poids de la dépense publique a pris des proportions inquiétantes, passant de près de 45% en 2011 à 50% du PIB en 2012. Alors que ces ratios sont de l’ordre de 27% au Maroc et 26% en Tunisie en 2011. -Selon les experts, la nouvelle croissance des dépenses de l’Etat prévue en 2014 avec l’abrogation de l’article 87 bis et les nouvelles structures administratives le cap des 50% du PIB risque fort d’être franchi en 2014. Le déficit budgétaire prévu pour 2014 est estimé à un niveau faramineux de 45 milliards de dollars qui risque d’être dépassé sauf coupes budgétaires dans certaines rubriques. Dès lors, le prix du baril de pétrole qui permet de financer les dépenses du budget de l’Etat qui était en 2013 marqué par une plus grande « prudence » de 105 dollars, pour 2014, devrait se situer entre 110/115 dollars.

 

  1.  Au moment où dans la majorité des pays, la rationalisation des choix budgétaires se généralise, l’Algérie continue à créer des emplois rentes-administratifs en accroissant la dépense publique par la création de nouveaux ministères et de nouvelles wilayas. Si l’on prend l’exemple récent français, à l’instar d’autres pays, il y aura dès 2015  réduction des structures  des collectivités locales par des regroupements régionaux. Le budget des collectivités locales est d’environ 338 milliards de  dollars ( 250 milliards d’euros) au cours actuel entre le dollar et l’euro-  soit 60% supérieur au PIB algérien de 2013, il était prévu au départ  une économie annuelle  entre 16 et  33 milliards de dollars  graduellement.  La fourchette décidée par le gouvernement français ,   le 03 juin 2014,  à été de 10 milliards d’euros soit 13,5 milliards de dollars.  D’où l’urgence pour l’Algérie aussi,  de rationaliser la dépense publique en prévision d’une chute des cours des hydrocarbures entre 2017/2020. La croissance passe donc par une plus grande efficacité des dépenses publiques en ayant une  vision à moyen terme de la maîtrise des dépenses Le cadrage pluriannuel des finances publiques constitue un instrument essentiel pour la mise en œuvre d’une politique de  maîtrise des dépenses publiques et de procéder  à une évaluation approfondie de l’efficacité des dépenses fiscales et sociales dont le montant dépasse un certain seuil. .Cela doit entrer dans le cadre d’une réelle volonté politique de décentralisation, à ne pas confondre avec la déconcentration. Les transferts de compétences de l’État vers les collectivités territoriales doivent être accompagnés d’un abandon effectif de la mission correspondante par les services de l’État, et du redéploiement de l’intégralité des agents de l’État concernés, pour éviter les doublons entre les actions de l’État et des collectivités territoriales. L’on pourrait imaginer une véritable régionalisation économique, à ne pas confondre avec l’avatar négatif du régionalisme, autour de grands pôles régionaux  où la commune doit se préparer à une mutation radicale devant faire passer du stade de collectivités locales providences à celui de collectivités entreprises responsables de l’aménagement du développement et du marketing de son territoire. C’est pourquoi la fonction de Wali- dont le rôle essentiel est celui d’animation et de coordination des communes, ne doit plus répondre aux critères actuels où l’administratif prime mais à des hommes managers d’un niveau intellectuel élevé et d’une haute moralité.  Les expériences  nous enseignent que les technopoles sont de véritables moteurs de croissance pour les pays, si tant est que les décideurs réalisent le bon choix de modèle en fonction du contexte du pays.. Mais la réussite implique une action coordonnée  comme suit : Premièrement, impliquer les acteurs  clés. Pour créer les conditions qui permettront à la fois d’attirer les investissements, de créer de l’emploi et de stimuler les innovations, la technopole doit être soutenue à la fois par les acteurs publics notamment dans le domaine des incitations fiscales, des subventions temporaires,  du foncier avec toutes les utilités et commodités  (Etat, banques publiques, universités…) et privés (entreprises, banques privées, chambre de commerce, syndicats patronaux. Dans ce cadre, l’on peut dynamiser l’entrepreneuriat féminin actuellement marginalisé. Deuxièmement, l’efficacité  doit reposer un modèle opérationnel performant et une gouvernance efficace. En matière de gouvernance, la pérennité de la technopole repose sur une autonomie de gestion et une autonomie financière qui lui permettent, de dynamiser la recherche de clients entreprises et pour des partenariats avec des entreprises externes. Pour contribuer durablement à la création d’emplois dans le pays, la technopole doit s’inscrire dans le cadre d’une politique d’innovation nationale définissant les secteurs prioritaires (industrie, énergie, agroalimentaire, services, etc.) en matière d’innovation, sur le long terme.  Troisièmement, adapter le modèle de financement. Le modèle de financement et d’exploitation de la technopole doit être construit en y associant plusieurs partenaires dans le cadre d’un partenariat public-privé. Un cadre réglementaire incitatif doit être  mis en place en matière d’investissements pour faciliter le financement des jeunes entreprises innovantes et en matière de fiscalité .Quatrièmement, les technopoles doivent s’insérer dans le cadre  de la concurrence internationale. Il s’agit de faire le marketing de l’offre en matière de prestations offertes aux entreprises (centres de conférences, bibliothèque, salles de réunions, helpdesk…).

 

 Conclusion-. La rente des hydrocarbures en Algérie, diffusion du   ‘’syndrome hollandais’’ génère plusieurs effets pervers,  la facilité  de dépenser sans compter et   la facilité d’importation au lieu d’entreprendre. L’utilisation de la manne pétrolière a différé  les réformes structurelles, le cadre macro-économique étant stabilisé artificiellement grâce à cette rente. Or,   comme j’ai eu à le souligner lors de la  conférence que j’ai donnée au parlement européen (Bruxelles 2013), et au Sénat français (janvier 2014)   la bataille de la relance économique future de l’Algérie et notre place dans la compétition mondiale se remportera  grâce à   la bonne gouvernance,   notre capacité à innover au sein  du grand Maghreb, pont entre l’Europe et l’Afrique.

 

Abondance en ressources naturelles comme malédiction

Le syndrome hollandais

 

Les économies abondamment dotées en ressources naturelles tendent à connaître une croissance relativement plus faible par rapport aux économies qui en sont dépourvues. A partir d’un échantillon de 95 pays, Jeffrey Sachs et Andrew Warner (1995) ont ainsi montré que les économies présentant de hauts ratios d’exportations de ressources naturelles sur PIB en 1971 tendent à avoir de plus faibles taux de croissance sur la période s’étalant de 1971 à 1989. Cette relation négative entre dotations en ressources naturelles et croissance demeurait une fois que Sachs et Warner aient contrôlé les variables traditionnellement considérées comme importantes pour la croissance économique, telles que le revenu par tête initial, l’ouverture commerciale, l’efficacité des institutions gouvernementales ou encore le taux d’investissement.

Le syndrome hollandais (dutch disease) décrit un ensemble de mécanismes par lesquels une forte dotation en ressources naturelles peut influencer négativement la croissance à long terme d’une économie. Le terme a été introduit par The Economist pour expliquer la stagnation de l’activité aux Pays-Bas durant les années soixante-dix comme le résultat de la découverte d’un large gisement de gaz naturel. L’exploitation de ressources naturelles génère habituellement de larges profits qui vont conduire au développement de l’activité minière au détriment des autres secteurs de l’économie. L’accroissement du revenu national et de la demande entraînent des pressions inflationnistes, tandis que l’afflux de capitaux se traduit par un excédent commercial et s’accompagne d’une appréciation du taux de change réel. La surévaluation du taux de change par rapport à ce qu’induiraient autrement les performances du pays va réduire la compétitivité des autres entreprises exportatrices. Celles-ci voient alors leurs profits diminuer, ce qui renforce les incitations à développer l’activité extractrice. Au cours du boom de ressources premières, les agents démontrent une forte préférence pour le présent qui les conduit à délaisser la question de la croissance à long terme de l'économie et à faire preuve de laxisme dans la gestion privée et publique. Une fois les ressources naturelles épuisées, l’atrophie de la base productive et la surévaluation du taux de change conduisent à une stagnation durable de l’activité économique.

La malédiction (curse) entourant les ressources naturelles n’est toutefois pas systématique et semble dépendre amplement du capital institutionnel de l’économie et de son degré de démocratie. L’Australie, le Botswana, le Canada et la Norvège ont par exemple su efficacement exploiter les abondantes ressources naturelles de leurs territoires pour se développer. Les économistes du FMI Rabah Arezki, Thorvaldur Gylfason et Amadou Sy (2012) se sont ainsi penchés sur ces expériences réussies pour identifier les réponses politiques et institutionnelles possibles qui s’offrent aux pays en développement pour répondre aux défis que leur pose la présence de ressources naturelles.

Le syndrome hollandais pose notamment la question de la stabilisation des taux de change et de la stérilisation des entrées de capitaux, en particulier lors des périodes de prix élevés des matières premières. Les coûts de stérilisation s’avèrent significatifs pour les pays en développement puisque les taux d’intérêts domestiques d’équilibre sont généralement supérieurs à ceux des pays avancés. Une politique budgétaire contracyclique peut toutefois fournir un degré automatique de stérilisation dans la mesure où les périodes de prix élevés des matières premières coïncident avec celles d’excédents budgétaires.

L’abondance en ressources naturelles complique toutefois la conduite de la politique budgétaire. En effet, les revenus du gouvernement dépendent alors largement des prix des matières premières, or ces derniers sont volatiles et imprévisibles. Les gouvernements doivent alors découpler à court terme leurs dépenses courantes des revenus et planifier à plus long terme des dépenses assurant l’équité intergénérationnelle. Certains instruments financiers peuvent couvrir contre la volatilité des prix des matières premières. L’accumulation d’épargne dans les fonds souverains ou l’investissement public sont deux moyens, éventuellement complémentaires, par lesquels le gouvernement peut gérer efficacement les revenus issus des ressources naturelles. Les pays en développement, notamment africains, éprouvent d’immenses besoins en biens publics, mais ils sont contraints par la capacité d’absorption limitée de leur économie, ce qui plaide dans leur cas pour la constitution d’une épargne (éventuellement au sein d’un fonds souverain) en parallèle à l’accumulation de capital public.

La croissance économique à long terme dépend du développement d’entreprises suffisamment nombreuses et diversifiées pour prendre le relais une fois que les ressources naturelles sont épuisées. Si les pouvoirs publics ont un rôle définitivement essentiel dans une telle diversification, les politiques industrielles à travers lesquelles l’Etat s’implique directement peuvent être capturées par les élites locales et susciter des comportements de corruption. Selon Arezki et alii, il serait alors plus judicieux pour les gouvernements d’impulser une diversification économique tirée par l’activité privée en mettant en place des règles incitatives. La diversification peut également être encouragée en allégeant l’imposition sur l’activité entrepreneuriale et l'innovation. Les recettes issues des matières premières peuvent être utilisées pour financer de nouvelles infrastructures propres à accroître les rendements et encourager l’investissement privé. Le développement du secteur financier peut également jouer un rôle dans ce processus de diversification.

En définitive, les auteurs soulignent la place centrale de la question institutionnelle. Les pays abondamment dotés en ressources naturelles voient leurs institutions sapées par les comportements de recherche de rentes et le clientélisme, or le capital institutionnel s'avère déterminant dans la trajectoire de croissance à long terme. Les travailleurs qualifiés tendent à se diriger vers les secteurs improductifs et la capture de rentes. Le cadre institutionnel doit ainsi être refondu pour orienter la main-d’œuvre qualifiée vers l’activité entrepreneuriale privée. Le développement du secteur financier nécessite quant à lui l’instauration de droits de propriété afin de jouer un plus grand rôle dans l’allocation de ressources vers les petites et moyennes entreprises. Une gestion plus transparente des revenus issus des ressources naturelles permet notamment une meilleure allocation des travailleurs qualifiés vers les secteurs productifs.

 

Source : http://www.blog-illusio.com/article-syndrome-hollandais-et-reponses-politiques-108078915.html

Références  Martin ANOTA

AREZKI, Rabah, Thorvaldur GYLFASON, Amadou SY (2012), « Beyond the curse: Policies to harness the power of natural resources », in VoxEU.org, 8 juillet.

CABRALES, Antonio,



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