Acueil Commentaire Le mensonge comme partage


Court-circuit

Slimane Laouari

Le mensonge comme partage


  Slimane Laouari     laouarisliman@gmail.com

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«Les prix des produits de large consommation n’ont pas connu d’augmentation significative», a dit Amara Benyounes, le ministre du commerce, à l’orée du ramadhan. Amara Benyounes ment effrontément puisque les prix de tous les fruits et légumes, de la volaille et à un degré moindre des viandes rouges, ont flambé. Ce n’est pas le plus gros mensonge de cet homme mais on s’en tiendra à celui là, parce qu’il en partage le «contexte» avec beaucoup de monde. Tout le monde ment tout le temps, mais c’est pendant le ramadhan que ça se voit le plus. Sans doute parce qu’on «n’a pas idée de mentir» avec le… ramadhan dans la bouche. C’est-à dire la bouche vide. Quand on a la bouche  pleine, on ne doit pas parler mais on peut mentir. C’est un peu compliqué, mais c’est aussi ça le ramadhan. Pas plus compliqué que cette méga cocasserie qui fait d’un mois de jeûne le mois le plus boulimique de l’année, non? Tout le monde ment pendant le ramadhan, et le plus gros mensonge est de prétendre partager la spiritualité, la communion, la convivialité et la générosité alors qu’on ne partage que le mensonge. Et la boulimie à parts inégales. Chacun selon ses moyens. Et plus le pays vieillit, plus ses enfants mentent. Tenez, pour coller à l’actualité, les joueurs de l’Equipe Nationale vont manger demain avant d’affronter l’Allemagne, mais ils disent tous qu’ils vont jeûner. L’entraineur leur a dit de ne pas en «parler», c’est- à-dire qu’il faut mentir. Il y’a trente deux ans, d’autres joueurs avaient bouffé et tout le monde le savait. L’Algérien ordinaire jeûne, s’énerve, traficote, spécule, remplace la bière par le shit, inverse la nuit et le jour pour dormir jusqu’à cinq heures de l’après midi, provoque des hécatombes sur la route parce qu’il faut être à la minute «M» à table, ne travaille pas pendant trente jours pour récupérer de trois cent trente cinq jours de paresse et compte les derniers jours avant l’Aïd comme un prisonnier qui en a pris pour dix ans. Entre un mensonge et un mensonge, il y a un mensonge. Le reste est spiritualité, communion, générosité et convivialité. C’est-à dire de gros mensonges.

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